Une histoire de badminton

Lorsque nous étions encore en France, Fara et moi jouions beaucoup au badminton. Jusqu'au mois de juillet 2010, je mangeais des volants presque tous les jours de la semaine. Depuis, avec les vacances, les projets personnels et notre déménagement, je n'ai joué qu'une seule fois et Fara zéro.

Ça fait donc plusieurs mois que les symptômes de manque des drogués du bad nous ont atteints : déplacement en pas chassés dans les couloirs, grosses baffes dans les oiseaux qui passent à notre portée, cris incontrôlés "C'est çaaaaaa !", "J'AI !...pas", "Vas-y !"...

En me renseignant sur internet, je sais depuis près de deux ans qu'il existe au moins un club dans la capitale. Nous ne nous sommes pas encore inscrits, d'abord par manque de temps, ensuite par soucis d'économie et enfin parce que mes cours de malgache sont en même temps que le seul créneau d'entrainement/jeu libre.

Mi février, un peu par hasard, je tombe sur les dates et le lieu du Championnat de Badminton de Madagascar : les 26 et 27 février 2011, au Palais des Sports de Mahamasina.
Ni une ni deux, le 26 février, en sortant de mon cours de malgache (et après un passage à notre resto fétiche), nous nous rendons à Mahamasina. Ainsi nous pourrons nous rendre compte du niveau national et des conditions dans lesquels les joueurs évoluent.

En arrivant, nous ressentons immédiatement l'ambiance qui existe dans les petits tournois de province en France : quatre terrains dans une petite salle, pas de gradin ou autre place pour les joueurs et spectateurs, des joueurs installés partout entre les terrains, des personnes qui se déplacent dans le gymnase en traversant les terrains avec des matchs en cours et sans faire attention, des gamins qui chahutent, de la musique pendant les matchs... De quoi rendre fou ou suicidaire un juge arbitre d'Île-de-France (spéciale dédicace à Pascal Candeille, notre JA préféré).

Je dois avouer que je m'attendais à de moins bonnes conditions. Bien que méritant un petit nettoyage, le sol était tout à fait correct (nous avons joué sur bien pire dans le 93). Les filets étaient tous en bon état, même si il n'y avait que des filets de simple - pas très pratique pour les matchs de double. Les poteaux étaient stables et à la bonne hauteur bien que certains de manufacture artisanale. Il n'y avait pas trop de gêne par rapport à l'éclairage. Le gymnase n'était pas une fournaise. Pas d'obstacle en l'air. Etc.

La première et la deuxième impression passées, nous nous sommes mis à observer les joueurs. Plus particulièrement leurs tenues et leurs jeux.

Si le tournoi avait eu lieu en France, je pense que 90% des joueurs auraient eu des problèmes par rapport à leurs tenues : survêtements, sweat-shirts, vêtements avec des paillettes ou des surfaces réfléchissantes, avec plein de couleurs, avec des illustrations n'ayant rien à voir avec le badminton, bermuda, tenue de basketteur, pantacourt, collant+short, chaussures de villes, Converse All-Star et même pieds nus ! Pieds nus en match du Championnat National ! Excellent :)
Nous avons aussi vu des groupes de joueurs (surtout des jeunes) se partager une raquette (pas dans le même match, je vous rassure).

Tout ceci n'est bien sûr que le reflet du manque de moyens financiers des sportifs malgaches et plus généralement du pays. Une paire de chaussure de salle coûte un mois de SMIC, ici.
Côté qualité de jeu, les premiers matchs que nous avons vus correspondaient surtout à du débutant et du non classé en Ile-de-France. Nous avons vu une dizaine de joueurs qui pourraient avoir un classement D. Pour ceux qui ne connaissent pas, c'est le classement le plus bas en France. Ça correspond au niveau que Fara et moi avons (ou plutôt avions l'an dernier :P).

Finalement, nous avons pu voir les meilleurs joueurs du pays s'affronter : les 12 joueurs pré-sélectionnés en équipe nationale. Je pense que, en France, quatre ou cinq d'entres eux seraient classés C et le meilleur d'entre eux (nettement meilleur que les autres, au moins ce jour là) se classerait B3-B4. Il a survolé le championnat sans perdre un seul set et sans jamais avoir été mis en difficulté.

En discutant avec certains joueurs (dont le numéro 2 malgache) et les deux organisateurs (oui, ils n'étaient que 2), nous apprenons que les deux meilleurs joueurs sont frères, que deux autres de leurs frères sont dans l'équipe nationale, que le vice-président de la fédération est leur père et que même que femme du numéro 2 a participé, entre deux tétés de leur petit dernier. C'est donc une histoire de famille !

Nous avons aussi appris que les clubs de la capitale sont au moins au nombre de six et qu'ils s'entrainent tous sur le même créneau. En plus des clubs de la capitale, deux clubs de province étaient présents. À la connaissance des membres de la fédération, il n'existe pas d'autres clubs sur la grande île.

Toujours en discutant avec les organisateurs, ils nous proposent de jouer en double mixte le lendemain, dans le cadre du championnat. Nous pensons d'abord à une plaisanterie... mais non. Surpris et amusés, nous demandons si le tableau n'est pas déjà complet. Ce à quoi ils nous répondent que les inscriptions ne se feront que lendemain matin et qu'ils acceptent tout le monde ! Impensable en France, même pour un petit tournoi de province ! Le temps d'échanger un regarde et nous acceptons avec enthousiasme et amusement.

Dimanche 27 février, nous arrivons à 7h30, chauds comme la braise. En arrivant, nous apprenons qu'ils ont pris beaucoup de retard et qu'ils commencent la journée par les matchs qui auraient dus être joués la veille. Faute à un échéancier à ma connaissance inexistant (l'affichage se limitant au tableaux finaux), après plusieurs fausses demande de préparations, trois échauffements et un risque d'annulation des tableaux de doubles à 15h30, nous ne jouons qu'à 17h passé.

Après huit mois sans badminton et presque quatre mois sans sport, pas de miracle : ce fut catastrophique. Je n'ai jamais aussi mal joué de ma vie en tournoi. Et certains d'entre vous savent comment j'ai pu être mauvais en tournoi ! Au final, une bonne grosse rigolade et une défaite 21/7 21/18.

Un article sur le championnat dans l'Express de Madagascar (regardez bien la photo).

Ces deux jours de badminton nous ont donné énormément envie de nous y remettre. Les joueurs et cadres présents étaient vraiment heureux d'accueillir "un vazaha et demi" dans leur championnat et nous ont vite proposé de nous inscrire dans le premier club de Tana, celui de la famille du numéro 1. Nous avons appris que en plus du créneau officiel du samedi matin, il y a d'autres possibilités de jouer dans la semaine. Nous partons donc avec un rendez-vous pris pour le samedi suivant ! :)

Dans le prochain billet, quelques autres photos du Championnat.
Plus de badminton gasy dans de prochains billets ;)

3 commentaires:

  1. Nous voyons bien le petit couple au fond de la salle. Cyril a-t-il reçu un coup de volant ou de raquette ? Fara a l'air d'être inquiète !!!
    Le double vazaha et demie ferait mieux la prochaine fois ! Amusez-vous bien...

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  2. On compte sur vous pour devenir des stars du badminton à Madagascar XD

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  3. manque de moyens financiers certes, mais tellement plus de liberté !!!

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